Compte rendu de la soirée du 25 juin 2012


Une centaine de personnes étaient présentes le Lundi 25 Juin pour écouter Alessandro Testa et Gabriel  Duverneuil nous parler  des

                      « Troubadours et l’Italie »
Alessandro Testa  nous explique d’abord comment l’art des troubadours s’épanouit en Périgord au XIIe siècle dans les cours de nobles  locaux. Il s’agit de la première expression littéraire non religieuse. A partir de l’an 1000, les hommes commencent à pouvoir se soucier d’autre chose que de leur survie ; des chansons parlant d’amour, de politique circulent. Les premières expressions poétiques sont l’affaire de la noblesse, ainsi naît « le fin Amor» ou  « amour courtois »,Il s’agit de célébrer l’Amour, la noblesse de cœur et d’esprit, non l’amour conjugal, mais l’amour sublimé pour une femme inaccessible, parfois seulement vue en peinture (Jaufré Rudel), pour la Dame, la Domna (qui domine) , le rapport de soumission, de fidélité totale.  L’Amor, mélange de souffrance et de désir transforme l’homme malheureux en homme « courtois », l’anoblit. Cependant les troubadours ne célèbrent pas que le  « fin Amor », tel Bertrand de Born parlant de la beauté d’un champ de bataille comme celle du corps d’une femme.
Au début du XIIIe siècle, la croisade des Albigeois  contre l’hérésie cathare ruine les nobles qui accueillaient les troubadours et ceux-ci sont obligés de s’exiler soit en Aragon, soit en Italie du Nord où l’on parle aussi la langue d’Oc. Ils rencontrent  là une noblesse  qui vit dans les villes, Cités-Etats enrichies  par le commerce et la banque. Il s’agit d’une société raffinée, élégante mêlant nobles et bourgeois prête à accueillir les troubadours et leur art.  A la cour des  Malaspina, par exemple, se succèderont onze troubadours dont Guillaume de la Tour, « notre »  troubadour, né probablement à  La Tour Blanche.
Gabriel Duverneuil nous propose alors de suivre le cheminement  de l’œuvre du Jongleur troubadour Guillaume de la Tour au cours des huit siècles qui nous en séparent.
A l’origine, comme pour toutes les œuvres des troubadours identifiés ou anonymes tout commence avec les « Chansonniers provençaux », recueils manuscrits de poésies réalisés à la fin du XIIIe et au XIVe siècle, pour la plupart dans la région de Venise. Il faudra attendre le XVIIIe siècle pour que ces manuscrits soient exhumés et, en partie, édités en France. En ce qui concerne Guillaume de la Tour, seuls deux de ses poèmes sont cités. Au  début du XIXe siècle l’intérêt pour cette poésie va de pair avec la naissance du  Romantisme, et  la fin de ce siècle verra, avec les écrivains et historiens de la mouvance du Félibrige,  la reconnaissance de l’immense apport de la poésie troubadouresque à notre littérature. Mais ces mêmes historiens et écrivains considèreront  Guillaume de La Tour comme un troubadour « mineur » ou un « petit troubadour ».
Il faudra attendre le début du XXe siècle,1934, pour que toute l’œuvre connue de Guillaume de la Tour  soit éditée en Italie par  Ferrucci Blasi ;  1991 pour que l’ouvrage de Blasi soit traduit en Français par Jean Monestier et enfin 2006 pour que soit publiée la première édition critique de son œuvre, tant sur le plan historique que littéraire par Antonella Négri  .
Gabriel Duverneuil expose alors les points essentiels du travail d’Antonella Négri , de ce qu’il faut bien appeler une réévaluation de son œuvre.
Guillaume de la Tour dès son arrivée en Italie,  fréquente les cours les plus prestigieuses comme celles des Malaspina ( Montferrat), des d’Este (Ferrare), des Da Romano (Vicence Padoue, Vérone), d’Uberto di Biandrate(nord du Piémont), d’Ottone del Caretto (Ligurie), il fréquente également des troubadours italiens de valeur comme Sordel, ce qui démontre sa parfaite intégration dans cette Italie cultivée et accueillante aux poètes décrite précédemment par A Testa.
Par l’analyse extrêmement fouillée de chacun de ses poèmes, A Négri montre que la simplicité de ceux-ci n’est qu’apparente, que la richesse des rimes, la multiplicité des figures poétiques le place à l’égal des « poètes  provençaux » qui animèrent les cours de l’Italie du Nord. C’est également un poète engagé dans les luttes politiques de son temps comme en témoignent les deux «sirventes » extrêmement mordants,  qui sont parvenus jusqu’à nous. Enfin Gabriel Duverneuil , après avoir lu deux poèmes de Guillaume de la Tour (traduction de Jean Monestier), indique en conclusion que le moindre des hommages n’est pas celui que lui rendra Louis Aragon qui le citera à deux reprises dans son « Henri matisse roman »en évoquant les correspondances  entre son œuvre, le Romantisme et Baudelaire.
A.Testa  conclut sur l’héritage littéraire que nous ont laissé les troubadours. Dans les cours  italiennes, leur écho est  immédiat et ils seront célébrés par  Dante et Pétrarque.  Il résonnera en Allemagne en Sicile en Espagne, mais il faudra attendre le XIXe siècle avec le Romantisme pour que l’art des troubadours soit réellement reconnu en France.
A la suite de la conférence, la dernière avant l’été, le repas (charcuterie et antipasti italiens préparés par Alessandro Testa,  tiramisu, choux à la crème et merveilles préparés par Lucienne, Alida et Martine) a réjoui les palais de  75 convives. Une belle soirée du Club Histoire avant la reprise le samedi 1er Septembre avec la Randonnée Historique qui aura lieu cette année à Saint Just.
Claude Duverneuil.


Samedi 1er Septembre : Randonnée « historique » à Saint Just
Lundi 22 Octobre : « 1600-1750 Quand la poste royale Limoges- Bordeaux passait par Cercles ! » Par Gabriel Duverneuil
Samedi 17 Novembre Après midi: Rencontres historiques de La Tour Blanche avec Anne- Marie Cocula, Michel Combet, Thalie de Molène sur le thème « Les guerres de religions en Périgord », puis projection du film « La reine Margot ».


Images de la soirée.