5ème Rencontres Historiques de La Tour Blanche du 23 Novembre 2013

« Antoine de Touneins,  Périgordin , Roi d’Araucanie et de de Patagonie et les indiens Mapuches du Chili et d’Argentine »  
 
Ces rencontres ont rassemblé une centaine de personnes entre 14h et 18h 30


G. Duverneuil commence par remercier tous ceux qui ont aidé à la préparation et à la réussite de cette journée, puis présente les intervenants :
    J.F. Gareyte, historien.
    Le groupe « Théatre au vent »  avec : Ana Maria Venegas et Julie Uteau, comédiennes,  Igor Quesada, musicien et chanteur
.


G Duverneuil nous brosse ensuite une rapide histoire du peuple des Indiens Mapuches jusqu’à l’arrivée d’Antoine de Touneins comme introduction à la conférence de J.F. Gareyte.
Les Mapuches occupent de manière ancestrale un territoire de l’Amérique du sud  limité à l’ouest par le Pacifique, à l’est par la cordillère des Andes, au nord par les vallées de l’Aconcagua et au sud par les régions face à l’ile de Chiloê. Ils ont une langue commune, le Mapudungun et une culture commune de tradition orale. Mapuche signifie « Homme de la Terre ». Leur mode de vie est agro-pastoral avec un grand respect de la terre et donc pratiquant culture et élevage extensifs. Il n’y a pas de propriété privée ni de la terre, ni du bétail.
Le mode d’organisation social est familial, avec un chef, le Lonko pour chaque clan. Les Lonkos se réunissent en sorte de Parlement pour les décisions importantes et élisent un chef de guerre, le Toqui , le cas échéant.
Certaines femmes, les Machis, ont un rôle dominant en matière de religion ou de médecine.
Les Mapuches forment un peuple jaloux de sa liberté : Les Incas ont essayé de conquérir leur territoire mais ont dû se replier au nord du rio Maule en 1485.
En 1540 débarquent les Conquitadores espagnols avec pour chef Pedro de Valdivia .
Ils tentent de conquérir la région, construisant villes et forts (Valdivia, Concepcion, Angol..). Cette tentative de conquête sera  mise en poème par Alonso de Ercilla dans « La Auracana », un fleuron de la littérature espagnole.
Un fils de Lonko , Lautaro, capturé par les Espagnols, apprend d’eux leur mode de combat et l’usage et l’entretien des chevaux. Il s’évade à 18 ans et, élu Toqui par son peuple, il conduit la révolte contre les Espagnols en 1552. Lautaro meurt en 1557 mais la lutte  continue plus ou moins violente jusqu’à la défaite définitive des Espagnols et la signature en 1643  d’un traité avec le Roi d’Espagne  reconnaissant le fleuve Bio-Bio  comme limite nord du territoire mapuche. Les Mapuches auront un siècle et demi de tranquillité pour échanger et commercer avec leurs voisins.
De 1813 à 1819 éclate la guerre d’indépendance de la colonie espagnole voisine, dans laquelle les Mapuches ne sont pas impliqués. Mais les partisans du Roi d’Espagne se replient en territoire mapuche et les Mapuches , fidèles à leurs engagements du traité de 1643, s’engagent à les aider.
Finalement les Indépendantistes gagnent, un nouveau traité est signé en1825, actualisant le traité de 1643,  reconnaissant toujours la frontière formée par le Bio-Bio entre la nouvelle République chilienne et le territoire mapuche, et exigeant des Mapuches qu’ils se désolidarisent des Royalistes.
Mais en 1845, l’Etat chilien déclare  colonisables les « terres vacantes » au sud du Bio-Bio, terres sur lesquelles vivent les Mapuches qui n’ont évidemment pas de titre de propriété. C’est alors qu’intervient celui que nous attendons tous :
               ANTOINE DE TOUNEINS !
Avant de passer la parole à Jean François Gareyte, G Duverneuil donne quelques éléments sur l’émigration des européens au Chili. Elle se produira à la fin du XIXe siècle sur instigation du gouvernement chilien, essentiellement des Allemands, des Croates, des Espagnols, des Français (environ 50 000) et des Anglais.
Puis il donnera quelques informations sur la situation actuelle de ce peuple, qui représente environ 6% de la population du Chili et qui mène de nombreuses luttes pour faire reconnaître son existence et récupérer ses terres
Actuellement les Mapuches n’ont  récupéré que 10% de leur territoire.
Au cours d’un intermède musical, Igor et Ana Maria nous chantent «El derecho de vivir en paz » (le droit de vivre en paix) de V. Jara , chanteur-poète assassiné en 1973 lors du coup d’état de Pinochet.


J.F. Gareyte va  ensuite s’attacher à détruire les idées reçues sur A. de Touneins, tendant à le présenter comme « un pitoyable mythomane provincial » ! Il s’appuie sur les archives qu’il a abondamment consultées au Chili et en Argentine et sur les nombreux contacts qu’il a eus avec les communautés mapuches.
Antoine Tounem naît en 1825 à Chourgnac près de Hautefort ,9ème enfant d’une famille de paysans aisés, dont tous les fils sont appelés « Prince ». Il reçoit quelques leçons particulières puis ses parents décident de lui payer des études au Collège Royal de Périgueux et il obtient son baccalauréat. Libéré de ses obligations militaires, il décide de faire du Droit, est diplômé en 1851 et achète une charge d’avoué auprès du Tribunal de Périgueux. Entre 1848 et 1852, il travaille au cabinet de Pierre Magne, ancien membre du gouvernement de Louis Philippe et…futur Ministre de Napoléon III.
Il grimpe les échelons de la bourgeoisie périgourdine et dépose une requête au Tribunal pour retrouver sa particule et l’ancienne orthographe de son nom.  D’abord refusée puis acceptée en1857, Il s’appellera dès lors A. de Touneins. Il entre à la Loge Maçonnique de Périgueux et est initié en1857.
C’est alors qu’il vend sa charge d’avoué florissante un bon prix et …disparaît.
Il prend le bateau pour l’Amérique du Sud et débarque à Coquimbo au nord de l’actuel Chili. Il s‘installe à La Serena, puis à Santiago et tente de faire des affaires, en particulier avec le cuivre. Il en informe ses amis de Périgueux, les incitant à le rejoindre. Puis, en 1860 il part à cheval pour un long périple à travers les Andes et prend contact avec les communautés mapuches. Il est alors convaincu que le chef reconnu qu’il doit rencontrer est le Lonko Manil, très âgé mais qui a en mémoire les traités affirmant l’inviolabilité du territoire mapuche. Manil meurt mais son fils Quilapan le remplace et rassemble les Mapuches. A. de Touneins grâce à son charisme, à ses talents d’orateur, et à ses promesses de leur procurer des armes, puisqu’il pense avoir l’oreille de Napoléon III par l’intermédiaire de P. Magne, les convainc de le proclamer Roi d’Araucanie et de Patagonie. Il a le temps d’en informer l’Empereur et le Président de la République chilienne avant de tomber, début 1862, dans un guet-apens de l’armée chilienne et d’être fait prisonnier. Il passe 6 mois en prison et est renvoyé en France.
Malheureusement, J.F.Gareyte n’a pas le temps de nous parler de la Constitution, très en avance sur son temps, qu’il a rédigée pour le royaume mapuche, ni des 2 autres voyages d’A. de Touneins au Chili avant sa mort en 1877.
Nous attendons avec impatience la sortie de son livre sur Antoine de Touneins qui devrait advenir dans le courant de l’année 2014.

Après un entracte au cours de laquelle les participants ont pu déguster les différentes pâtisseries préparées par les bénévoles de l’Amicale, l’équipe de Théâtre au vent produira un spectacle mêlant conte musique et théâtre.
Ana Maria, accompagnée d’Igor nous contera une légende mapuche « le conte des deux serpents », puis  Julie se joindra à eux pour la lecture d’un fragment de la pièce d’un écrivain chilien actuel, Juan Radrigan :  « Médée mapuche ».
Un bel après-midi d’hiver qui nous aura fait découvrir des peuples et des horizons nouveaux !
Claude Duverneuil


 La journée en quelques images :

de G à D : Igor Quezada,Julie Uteau,Gabriel Duverneuil,Ana Maria Venegas,Jean François Gareyte.




Julie Uteau

Gabriel Duverneuil


Jean François Gareyte


Igor Quezada



De G à D : Julie Uteau,Gabriel Duverneuil,Ana Maria Venegas,Igor Quezada,Jean François Gareyte.
 
Igor Quezada,Ana Maria Venegas.








Rencontres Historiques

« Antoine de Tounens Périgordin, roi d’Araucanie et de Patagonie et les indiens Mapuches du Chili et d’Argentine »

Samedi 23 Novembre à La Tour Blanche, salle polyvalente, de 14h 30 à 18h30
Le club d’histoire Mémoire et patrimoine de La Tour Blanche vous invite à participer à ses « Rencontres Historiques » qu’il organise annuellement depuis cinq ans. Le principe est simple : autour d’un thème historique, donner à voir au public les diverses manières artistiques et historiques de le traiter et susciter l’ouverture aux autres disciplines musicales, théâtrales, littéraires, poétiques qui veulent aborder ce thème.
Cette année nous faisons appel à plusieurs intervenants et le thème sera abordé sous plusieurs angles : historique, ethnologique, musical, poétique et théâtral.
Les intervenants seront :
Jean François Gareyte, guide départemental, écrivain et musicien, spécialiste du patrimoine occitan. (Il est l’auteur de « l’aube des troubadours : la chanson d’Antioche du chevalier Béchade »).
Originaire de Hautefort, près de l’endroit où a vécu Antoine de Tounens, il s’est passionné pour l’histoire d’Antoine de Tounens et pour le peuple Mapuche.
Jean-François Gareyte vient de passer ces six dernières années à travailler dans les archives chiliennes et argentines, ainsi que dans les communautés de Mapuches du sud du Chili et de la cordillère des Andes pour aller recueillir des informations sur ce personnage, car on ne sait finalement pas grand-chose sur Antoine de Tounens, le fameux "roi d'Araucanie". Les quelques ouvrages, (précis historiques ou romans), écrits à son sujet nous ont décrit un personnage mythomane, manipulateur, menteur et complètement fou.
Dans sa communication basée uniquement sur le tout début des aventures d'Antoine de Tounens, J-F Gareyte fera part, documents inédits à l'appui, de ses découvertes sur le roi d'Araucanie.
Alors ! Antoine de Tounens le roi d'Araucanie et de Patagonie, un pitoyable mythomane provincial ou bien un des plus grands aventuriers de l'histoire de France?
Gabriel Duverneuil, animateur du club Histoire Mémoire et Patrimoine de La Tour Blanche et des environs, passionné d’histoire et que des liens très forts unissent au Chili, présentera en introduction l’histoire de ce peuple indien jusqu’à l’arrivée d’Antoine de Tounens, leur mode de vie et leur culture. Il évoquera également l’immigration française au Chili et la situation actuelle des Mapuches dans ce pays.
Après une pause au cours de laquelle le public pourra emprunter des livres sur le thème du jour, provenant de la Bibliothèque Départementale de Prêt, auprès des animatrices des bibliothèques de La Tour Blanche et de Goûts, et déguster les délicieuses pâtisseries confectionnées par les membres de l’Amicale de La Tour Blanche et se désaltérer au bar, l’après-midi se poursuivra avec le spectacle de la Compagnie Théâtre au vent que dirige Ana Maria Venegas.
Ana Maria Venegas, comédienne, conteuse et metteur en scène, est née au Chili où elle se forme au théâtre à l’académie Duvauchelle de Santiago du Chili. Elle portera la parole de grands auteurs dans plusieurs pays d’Amérique du sud mais aussi en Tunisie en Espagne Portugal. Elle s’établit en France en 2000 et y montera deux pièces de Juan Radrigan, grand dramatuge chilien, plusieurs fois primé au Chili en 2005 et 2011. En 2002 Ana Maria Venegas crée la compagnie « Théatre au vent » (en hommage au grand poète chilien Pablo Neruda). Son dernier spectacle « Paquita de los colores » a été présenté au festival de Biarritz « les translatines » le 16 octobre dernier.
A La Tour Blanche Ana Maria nous présentera un conte mapuche et une lecture d’un fragment de la pièce de théâtre de Juan Radrigan « Médée mapuche ». Elle sera accompagnée par Igor Quezada.

Igor Quezada : Né à Bordeaux durant l’exil politique de ses parents, il grandit dans la musique traditionnelle chilienne. A 7 ans il retourne au Chili avec sa mère chanteuse, puis revient en France en 1998 pour étudier à l’Université puis aux Beaux-Arts. Il est chanteur/ guitariste du groupe bordelais Guaka depuis 2005. Depuis sa rencontre récente avec Ana Maria Venegas, il l’accompagne sur les planches depuis le spectacle de Paquita de los colores.
Venez nombreux à la découverte d’un autre Antoine de Tounens et d’artistes de talent qui vont nous faire découvrir de nouveaux horizons.
G Duverneuil


Rencontres Historiques


 

 


Compte rendu de la conférence du 28 octobre 2013


                            L’histoire de Cherval par Sylvie Vidal

Environ 110 personnes assistent à cette réunion.
G. Duverneuil annonce :
-les Rencontres historiques de La Tour Blanche auront lieu le Samedi 23 Novembre de 14h30 à18h30 sur le thème :Antoine de Touneins, Périgourdin , Roi d’Araucanie et de Patagonie et le Indiens Mapuches du Chili et d’Argentine, Ethnologie, Histoire, Poésie, Musique, et littérature vont se rencontrer avec les participations de Jean François Gareyte, G Duverneuil et la compagnie Téatrovent de Ana Maria Venegas Uteau
-la fin de la fouille archéologique de « Chez Tézy » à laquelle ont participé en 2 ans une vingtaine de personnes. Elle donnera lieu en 2014 à une conférence du Club Histoire et Patrimoine au cours de laquelle G Duverneuil présentera les résultats de l’opération « Chez Tézy », et Francis Gérard fera part également de son expérience des fouilles auxquelles il a participé deux années consécutives dans le Lot et Garonne avec l’archéologue Alain Turc.
-la création sur le canton de Verteillac d’une équipe de volontaires sous l’égide de l’association « La pierre angulaire », chargée de répertorier et d’étudier le petit patrimoine.
F Giroud nous présente ensuite cette association et ses travaux dans la région. Une conférence est prévue sur ce sujet le 27 Janvier 2014 avec Mme Catherine Schunk.
G. Duverneuil passe enfin la parole à Madame Sylvie Vidal qui nous parle de ses recherches historiques sur Cherval, village avec lequel elle a de très forts liens familiaux.

  Cherval : Au carrefour du Périgord et de l’Angoumois

Elle nous présente d’abord le plan de Cherval, commune de 1814 hectares, baignée par la rivière « La Pude ». L’étymologie, sans doute d’origine celtique, du nom de Cherval pourrait être double : soit « clair val », soit « Hairovard » du nom d’un personnage germanique. Cherval est mentionné dès le XIVe S sous les noms de Charavart, Charvard, Charval, pour aboutir au XIXe S à Cherval.
Les lieux sont occupés dès la préhistoire, comme en témoigne une hache en silex trouvée près des tourbières. Des céramiques néolithiques, gallo-romaines puis médiévales ont été découvertes près de l’étang des Faures. Au bord de la Pude ont été retrouvé des restes d’habitat gallo-romains et une butte en forme de croissant paraît témoigner de l’existence d’une motte féodale.
-L’histoire de Cherval est marquée pendant près de 1000 ans par sa coupure en 2, une partie dépendant du Périgord, l’autre d’Angoulême. Elle a traversé des périodes de graves désordres, en particulier celle de la Fronde avec les exactions des soldats du Roi et celle de la Révocation de l’Edit de Nantes avec des abjurations forcées.
-Cherval compte de nombreuses belles demeures dont le Château du Bourbet, possession des Seigneurs De Lageard , le Logis du Tranchard, le Manoir de la Feuillade qui abrita, enfant, P. de Bourdeilles, futur Abbé Brantôme, etc…L’ église de type byzantin à 4 coupoles est dédiée à St Martin de Tours et date du XIe S. Elle a été fortifiée au XIIe puis au XIVe S. Les Seigneurs De Lageard y sont inhumés jusqu’en 1778. Elle est classée Monument Historique depuis 1913.
-La vie de habitants est rythmée par des épidémies, des accidents mais aussi par des évènements plus heureux comme des naissances. Cherval compte de nombreuses naissances multiples et… des centenaires, ce qui n’était pas très courant.
-En 1789, après un hiver très rigoureux qui accroit la misère du peuple et les protestations, le Roi lance les « Cahiers de Doléances » comprenant 2 parties , la première pour dire ce qui ne va pas, la seconde pour faire des propositions. Grande doléance dans les Cahiers de Cherval : l’inégalité devant l’impôt… (Déjà !) Due en partie à la coupure entre Périgord et Angoumois. Autre doléance : une justice apparemment très contestable rendue par le Seigneur De Lageard dans des locaux insalubres de son château du Bourbet.
- Après 1789 on note quelques jeunes volontaires partis défendre la République. On procède aussi à l’éradication des symboles de la puissance féodale, tels que tours, tourelles et créneaux de châteaux.
-Au XIXe S., les conseils municipaux se consacrent essentiellement aux problèmes de voirie (Pont de St Martin sur la Pude), de construction ou entretien de bâtiments municipaux (Ecole, presbytère..) et des questions sociales, (en particulier le problème des enfants abandonnés).
-L’agriculture se consacre essentiellement à l’élevage, la terre n’étant pas très riche. Il y a des vignes à Cherval et certains se rappellent encore d’un délicieux raisin blanc, le « chevrier » ! Dans la Pude on pêche au XIXe l’écrevisse, le brochet et l’anguille. Les tourbières sont exploitées, fournissant combustible, engrais et litière.
-La population culmine en 1709 aux environs de 1900 habitants et tombe à 295 en 1982. (315 en 1990). La commune a toujours été terre d’accueil en particulier des Vendéens et des Bretons.
En Guise de conclusion S. Vidal nous redit tout son attachement à cette terre de Cherval qui accueillit son arrière-grand-père et vit naître sa grand-mère.

Claude Duverneuil.

N.B. Ce compte-rendu n’est qu’un court aperçu du travail réalisé par S. Vidal. Ceux que cela intéresse peuvent commander sa brochure






Histoire de la commune de Cherval.



   La commune de Cherval, dépendant du canton de Verteillac, est riche d'une histoire passionnante et surprenante qui prend sa source dans les racines de la préhistoire.

    Rattachée à la châtellenie de la Tour-Blanche au XIV e siècle puis à un seigneur proche du pouvoir royal, la paroisse de Cherval fut marquée par les épidémies et les guerres civiles tout au long du temps. La Révolution française et le XIX e siècle laissent également des traces encore visibles.

    Outre les monuments (église, presbytère, mairie, écoles, etc) qui seront évoqués, les habitants ont une place privilégiée dans cet exposé qui met en perspective les relations humaines à travers des anecdotes puisées dans les écrits anciens : soldats, forçat, habitants révoltés par le regroupement de Cherval avec une voisine commune, enfants abandonnés, héros du quotidien,  ... sortent de l'anonymat.

    La recherche dans les archives a permis de mettre à jour cette fabuleuse histoire depuis les temps reculés jusqu'à la fin du XIX e - début du XX è siècle et de proposer une conférence d'une durée d'une heure animée par une projection de diapositives.

Par Sylvie VIDAL
 Responsable des archives contemporaines aux archives départementales de la Dordogne.



   

   

Compte rendu détaillé



 A la découverte du patrimoine historique du Chapdeuil 

Samedi 14 septembre 2013

 Circuit effectué par les promeneurs

Place du Marché

Nous avons commencé le circuit sur l’ancienne place du marché au pied de la croix1
L’existence de ce marché est attestée en 1594 par l’enquête effectuée par le sénéchal De Gravier à la suite de la demande de la création d’un marché à Léguillac-de-Cercles. Cette enquête cite les marchés de La Tour Blanche Chapdeuil, Champagne, Fontaine, Ribérac, La Rochebeaucourt et Brantôme. Quatre foires s’y déroulaient chaque année, au « Jeudi gras », le 11 Juin (St Barnabé), le 4 Octobre et le 6 décembre réservé au « louage des domestiques ».
Aux origines du Chapdeuil
Ce marché est certainement très antérieur au règne d’Henri IV car Le Chapdeuil est situé au bord de la voie gallo-romaine Périgueux-Saintes (Vesuna-Mediolatum). Le peuplement depuis l’époque gallo-romaine est attesté par la découverte de vestiges aux abords du hameau de Fougères en 1891 lors de la réalisation de la nouvelle route rejoignant St Just. Notons que cette voie est jalonnée de « villas gallo-romaines, celles de Villeneuve (Cherval) et de la fontaine de la ville (Goûts) étant les plus proches, de même que Chapdeuil est proche du croisement de cette voie gallo-romaine avec celle plus ancienne encore qui reliait Bourges à Bordeaux. Un peuplement Franc pourrait également avoir donné son nom au hameau de Francoiseau.
Le nom du Chapdeuil apparaît pour la première fois sous la forme de « Capdolium » en 1143 dans une donation de l’église du Chapdeuil à l’abbaye de Saint-Cybard alors qu’elle dépendait jusque-là de l’abbaye de Trémolat.
Le Périgord est christianisé à partir du VIe siècle. La délimitation des paroisses et de l’évêché de Périgueux se feront relativement rapidement introduisant une certaine stabilité territoriale. Le développement du mouvement monastique va introduire de nouvelles influences extérieures au Périgord comme celle de l’abbaye de Saint-Cybard d’Angoulême, qui deviendra prépondérante dans ces territoires proches de l’Angoumois. Au milieu du XIIe siècle, en 1142 puis en 1143, l’évêque de Périgueux va confirmer la possession par l’abbaye de Saint-Cybard d’Angoulême de l’église de Cercles, la chapelle de La Tour Blanche, l’église du Chapdeuil, et celles de La Chapelle-Montabourlet et de Bourg des Maisons.
A la période féodale ces territoires cités vont être un enjeu entre les évêques et comtes d’Angoulême, le vicomte de Limoges et le comte du Périgord. Mais alors que La Tour-Blanche, La Chapelle-Montabourlet et Cercles vont constituer le noyau d’une enclave angoumoise dans le Périgord, Le Chapdeuil restera en Périgord.
Aux Xe et XIe siècles, profitant de la faiblesse des pouvoirs comtaux aussi bien en Angoumois qu’en Périgord, une multitude de petits seigneurs édifient des forteresses sur des élévations naturelles ou sur des mottes artificielles. Les liens vassaliques créés conduisent à la formation des premières châtellenies. Le contrôle des voies de communications, peu nombreuses, est essentiel tant du point de vue militaire qu’économique. La voie Périgueux vers Angoulême et Saintes sera source de revenus pour les seigneurs du Chapdeuil comme pour ceux de La Tour Blanche.
C’est au XIIe siècle que l’on situe la construction du premier « château » sur l’ilot que nous allons visiter à la fin du parcours.
Mais cette construction a certainement été précédée par la réalisation des douves utilisant un méandre de l’Euche pour constituer l’ilot qui sera fortifié et abritera sans doute les premiers bâtiments du village médiéval. La superficie de l’ilot (4000 m2), le reste de murailles entourant l’ilot, le dallage de certaines parties des douves conduisent à le penser. De plus les propriétaires ont pu observer, à la fin de l’été après une coupe de luzerne, « le dessin d’une ligne de rempart flanquée de deux tour carrées ».
Les deux plus anciens parchemins faisant état des vassaux des seigneurs de La Tour dont dépend le Chapdeuil sont du XIIe et du XIIIe siècle.
Dans celui du XIIe2, Chapdeuil est nommé « Capdolio » et les vassaux cités sur le territoire du Chapdeuil sont « Geraldi de Capdolio », « Chailac de Capdolio », « Guillaume Itier de Capdolio », « Arvei (Hervé) de Capdolio ».
Celui du XIIIe (1249), est le testament d’Itier de la Tour avant de partir en croisade en Egypte aux côtés de Louis IX (Saint Louis). « Chapdol » est l’une des trois châtellenies contrôlées par le seigneur de La Tour Blanche : Grésignac, Chapdeuil et La Tour Blanche. Sont cités comme vassaux au Chapdeuil « Helias Raymond, Hélias Milo et Girauz Iter ».

Le hameau de Fougères

Le balet ou « balaï » périgourdin, est élément architectural très présent dans notre secteur, il se décline ici avec une élégante colonne atypique, remplaçant peut être à une époque plus récente une colonne plus classique. Un four occupe le fond de cet espace.
Fougères possède également une maison ancienne qui fût peut-être un établissement religieux qui comporte une croix en ronde bosse sur le pignon sud, retaillée à une époque plus récente3.
Le passage dans ce hameau, qui fût le plus important du Chapdeuil, est l’occasion d’évoquer le village à la fin du XVIIIe siècle et au XIXe siècle.
Un instituteur du Chapdeuil, Mr Durand, a dressé il y a quelques années la liste des métiers exercés en 1793 d’après l’étude des registres de l’état civil. Le résultat est étonnant car il montre que l’activité économique était intense. La plupart des habitants sont des « laboureurs » mais on trouve trois maréchaux-ferrants portant le nom de Lapouze dans le hameau de Lapouze! Deux menuisiers, un meunier, deux tailleurs d’habit, un officier de santé4, un praticien5, un procureur, un marguiller6, une sage-femme, un aubergiste, un négociant, un galocher7, deux sargeurs8, un tisserand et deux mystérieux « précheteurs ». Mr Durand a également étudié le peuplement du Chapdeuil en 1846 c’est-à-dire à l’époque du pic de population en Dordogne (505.000 h en 1846, 420.000 actuellement). Le Chapdeuil comptait alors 323 h, le hameau des Fougères était le plus peuplé : 80h, venaient ensuite le Bourg : 64h, La Pouze : 52h, Francoiseau : 47h puis Les Granges : 33h.

La fusion/séparation du Chapdeuil et de Saint-Just

Le XIXe siècle fut empoisonné par l’interminable querelle qui surgit à l’occasion du regroupement des communes du Chapdeuil et de Saint-Just.
En 1792 au moment de la création des communes et des départements deux communes distinctes sont créés, Chapdeuil et Saint-Just. En 1823 une décision funeste est prise ! Le préfet ordonne la fusion des deux communes malgré l’opposition des deux conseils. Dans un premier temps Chapdeuil s’y rallie mais Saint Just s’y oppose farouchement et récuse Mr De Jovelle nommé comme enquêteur.
En 1827 La fusion est décidée par le roi. De 1830 à 1831 Saint-Just fait de la résistance et accuse le maire issu du Chapdeuil « d’anomalies de gestion ». En 1836 l’ensemble du conseil demande à l’unanimité la séparation. De 1839 à 1870 enquêtes et contre-enquêtes se succèdent, ainsi que pétitions et démissions. La guerre de 1870 interrompt la guéguerre, mais dès 1872 l’affaire repart de plus belle avec une troisième enquête préfectorale et révocation de différents maires. En 1885 nouvelle enquête et enfin, en 1887, décision de séparation est prise.
L’affaire aura duré 64 ans, fait l’objet de 67 délibérations des diverses instances et de quatre enquêtes. Difficile de trouver d’autres exemples d’une telle ténacité dans l’hostilité. Heureusement le temps a effacé les vieilles querelles!
Nous poursuivons la promenade dans les bois vers les Granges où nous sommes accueillis par Mme et Mr De Tessieres.

Les Granges











 Dans ce hameau on trouve cette très belle ferme du XVIIe siècle avec balet, magnifiquement restaurée. Ce qui frappe c’est l’élégance des deux colonnes avec leurs chapiteaux ouvragés et la présence d’une bouche à feu sur la droite du balet. Dans un autre bâtiment du hameau d’aspect rustique on découvre deux étonnantes cheminées monumentales, dont il se dit qu’elles pourraient provenir du château du Chapdeuil.

Des Granges nous partons à travers bois vers le hameau de La Pouze.
La commune du Chapdeuil est très boisée et offre de nombreux chemins de randonnée pédestre. Plus de la moitié de notre parcourt va se dérouler dans les bois, avec, au débouché du chemin qui va croiser l’ancienne voie romaine, de très beaux points de vue sur la vallée de l’Euche.
Après avoir quitté la route qui va du Chapdeuil à La Tour Blanche et Cercles nous passons à côté de carrières de pierres qui ont fait un temps la renommée du village. Il s’agit d’un calcaire très dur qui s’extrait par clivage et fournit de très belles dalles. C’est dans ce même endroit que, dans les années 1970, eurent lieu des forages en vue de trouver du pétrole qui ont fait naître l’espoir d’un développement économique. Las, la seule ressource demeure la pierre et son extraction depuis des temps immémoriaux. Célèbre par sa mention sur les cartes géologiques, l’anticlinal du Chapdeuil est dévoré d’année en année par l’exploitation de carrières à ciel ouvert ce qui fournit du travail à quelques familles du secteur Chapdeuil La Tour Blanche Bourg des Maisons et Cercles.
Au croisement de la voie romaine, avant d’arriver à Lapouze, nous faisons une halte que je vais mettre à profit pour évoquer les épisodes les plus douloureux et mouvementés de l’histoire du Chapdeuil, qui se sont déroulés dans le deuxième tiers du XVIIe siècle.
Le Chapdeuil au XVIIe siècle :
Ce siècle avait commencé dans la paix retrouvée après l’édit de Nantes et un redémarrage économique et démographique sous Henri IV. Cela ne durera pas, mais ce début du XVIIe restera dans les esprits comme un âge d’or en comparaison de ce qui surviendra à la fin des années 20.

Famine et Peste

En effet les années 1628-29 voient ressurgir la famine, immédiatement suivie du retour de la peste en 1630. Elle frappe des hommes femmes et enfants affaiblis qui succombent par milliers. En 1631 Périgueux a perdu 2000 personnes sur une population qui ne dépasse pas 10 000 habitants. Les campagnes comme les villes sont touchées. Nous en avons le témoignage pour notre secteur dans le récit de la vie d’Alain Solminihac9 qui, se rendant de Chancelade à l’abbaye de la Couronne, et arrivant près de La Tour Blanche rencontre un homme d’un des hameaux du Chapdeuil qui lui dit de ne pas suivre sa route car la peste est partout. « Il voulut le dissuader de passer en ce lieu, attendu que l’air même était infesté, à quoi le saint homme, zélé du salut des âmes, répondit et demanda si ces pauvres malades avaient confessé leurs péchés, et le gentilhomme répliquant qu’il n’y avait prestre si hardi qui osât approcher de ce lieu……..Il courut en toute diligence audit village et frappant aux portes de tous les pauvres abandonnés, il les exhorta à se mettre en bon estat pour la confession, ce qu’ils firent, se confessant tous à lui » Ce récit, bien qu’hagiographique, nous donne le ton sur ce moment terrible : la peste est partout !

Révolte des croquants

Cinq ans plus tard à partir de 1635 toute la région s’embrase. A Périgueux c’est la révolte des tavernes et dans la Saintonge, l’Angoumois, le Périgord et le Quercy c’est la révolte des croquants. Les paysans n’en peuvent plus des impositions successives levées pour financer la guerre contre l’Espagne. En mai 1636 la foire de la Latière se fait l’écho des révoltes de l’Angoumois tout proche. La levée de nouvelles « racions10 » déclenche la révolte en Périgord. Deux sergents collecteurs d’impôts sont tués à Nantheuil-de-Bourzac. Le 7 mai 1637, 30 000 paysans se rassemblent près de Périgueux et mettent à leur tête La Mothe Laforet et quelques petits nobles. Leurs chefs les plus audacieux seront Grellety, Buffarost et Madaillan. Grellety résistera jusqu’en 1642 dans la forêt de Vergt.
Le 22 janvier 1640, Henri de Bourdeille, sénéchal et gouverneur pour le roi du Périgord donne commission à Pierre Grand du Pouzet de Tinteillac de rassembler et commander 150 soldats « pour courir sur les séditieux croquants révoltés ». Mais Henri de Bourdeille mourra avant de mater la révolte qui ne s’éteindra qu’avec l’amnistie des rebelles décrétée par Richelieu en 1642.

La Fronde

Six ans plus tard la France sera de nouveau en guerre civile, secouée de 1648 à 1653 par ce que l’on a appelé la Fronde. Notre région sera particulièrement touchée par la dernière phase de cette révolte nobiliaire contre la mise en place de l’absolutisme royal que l’on appellera la Fronde des Princes. Cet affrontement se déroule pendant la minorité de Louis XIV, la régence d’Anne d’Autriche, le gouvernement de Mazarin et en pleine guerre contre l’Espagne.
De 1648 à 1651, a lieu la Fronde des parlements, qui voit la fuite du roi et de sa mère à Saint-Germain, la révolte de Paris, puis le ralliement au roi de quelques frondeurs. A partir de 1651 l’affrontement a lieu entre la famille royale et Mazarin et les Bourbons (Condé11, Conti son frère et Longueville son beau-frère). Arrêtés en 1650 puis libérés par Mazarin en 1651, ils feront un retour triomphal à Paris.
En septembre 1651 débute la fronde des Princes. Condé est le 22 septembre à Bordeaux qui se rallie à lui, de même que l’immense majorité de la noblesse de Guyenne. Il passe un accord avec les Espagnols12: en échange de 1 500 000 Livres il leur donne un port: Bourg sur Gironde. Mais si, outre la Guyenne, la Saintonge, l’Aunis, le Berry, le Limousin et la Provence lui sont acquis, il lui manque le Périgord. Fin 1651 le Grand Condé vient à Périgueux pour s’assurer de l’appui des « nobles bourgeois de Périgueux » et pour rencontrer François Sicaire de Bourdeille titulaire à ce moment-là de la charge de Sénéchal du Périgord13 et le gagner à sa cause. Périgueux lui est livré et il installe le 25 Janvier 1652 une garnison de frondeurs avec à sa tête Chanlost. François Sicaire se rallie à lui et Condé lui laisse 120 000 Livres pour lever 3 régiments de cavalerie : 18 compagnies de 30 cavaliers et un régiment d’infanterie de 20 compagnies de 50 hommes.
François Sicaire charge son trésorier Emeryc Bariasson seigneur de Ramefort14 de distribuer ces subsides à tous les partisans supposés de la Fronde dans cette partie du Périgord. Emeryc Bariasson, en bon et scrupuleux trésorier, établit la liste des bénéficiaires avec en regard les sommes distribuées. C’est ainsi que nous connaissons la participation de De Fayolle seigneur du Chapdeuil, de De la Croix seigneur de Jovelle, du maitre de poste de Cercles, Beauvays et de bien d’autres, une liste de 70 noms qui se révèlera très compromettante par la suite. Curieusement figure sur cette liste Grand du Pouzet seigneur de Tinteillac pourtant fidèle du roi, mais il se retirera rapidement de l’affaire, abusé semble-t-il par son amitié pour François Sicaire et ses liens anciens avec les Bourdeille.
A partir de ce moment les évènements s’accélèrent : Le 2 février 1652 François Sicaire s’enfuit de Bourdeilles avec son or, son argent et le reste de ce que lui a donné Condé. Il vient d’apprendre qu’Henri de Lorraine, comte d’Harcourt, général des armées du roi en Guyenne fait mouvement pour investir le Périgord. Effectivement d’Harcourt sera là le 4 Février. En cette occasion, François Sicaire confirmera ce que l’on disait de lui, «qu’il manquait également de résolution pour servir ses amis que pour les trahir ». Mais le comique cède le pas à la tragédie, car les 7000 hommes de d’Harcourt vont occuper Bourdeilles, Brantôme, La Tour Blanche, Le Chapdeuil, Fongrenon, Lisle pendant 17 jours et vont y semer la terreur.
F de Bessot dans son livre de raison écrit ceci : « Ils consomment la plus grande part des vivres et fourrages et commis quantité d’actes hostiles en la personne des curés et leurs églises, forcé filles et femmes même dans les lieux les plus saints qu’ils avaient convertis en écuries, boucheries et bordels » Puis d’Harcourt part vers le sud du Périgord laissant des garnisons dans ces villages. Seul le château de Tinteillac et les propriétés de Grand du Pouzet seront épargnées sur ordre de d’Harcourt car le ralliement au roi de Grand du Pouzet était connu.
En Avril 1652 a lieu la contre-offensive des frondeurs, Conti (frère de Condé) détache 400 hommes pour chasser les garnisons royales de Bourdeilles, La Tour Blanche et Chapdeuil. Le premier mai il attaque la garnison du Chapdeuil, voici le récit qu’en fait P de Bessot : « Le premier mai, ayant appris que le régiment de St Arbre était à Saint Just au lieudit Le Chapdeuil, les gardes de Mr Le Prince (Condé), avec la cavalerie de Duras, s’avancèrent pour investir le lieu où ils étaient. Ce que voyant les ennemis firent quelques charges et tuèrent 2 à 3 cavaliers de Duras et des gardes mais sachant que le paréage avançait ils aimèrent mieux se rendre qu’attendre les paysans du paréage qui étaient d’un nombre de 800. Le nombre des prisonniers fait au Chapdeuil était de 150, on avait amené un canon de la ville conduit par l’infanterie de la ville de Périgueux. Les prisonniers furent conduits à Château-l’Evêque et les officiers à Périgueux. Il fut brûlé au bourg du Chapdeuil 2 à 3 maisons pour obliger les cavaliers à se rendre plus tôt, le canon fut ramené sans rien faire »
Le 3 Juillet les frondeurs poursuivent leur offensive, ils attaquent et prennent La Tour Blanche. Ils sont dirigés par Saint Aubin, capitaine de Condé, qui prend la ville sans coup férir car le capitaine des troupes royales s’enfuit à son arrivée sans combattre.
Dès lors, de Juillet 1652 à Mai 1653, tout le Périgord est aux mains des frondeurs. Dans notre secteur, La Tour Blanche, Chapdeuil, Verteillac, La Chapelle-Montabourlet, Fongrenon, Jovelle sont occupés par leurs garnisons.
Mais dans le même temps, le vent a tourné pour les frondeurs dans le reste du pays. Le 21 Octobre 1652, Louis XIV rentre triomphalement à Paris, Condé est déchu et condamné à mort. D’Harcourt a été remplacé par Folleville à la tête des armées royales. D’abord battu en juin 1652 à Montanceix par les frondeurs, il reprend l’offensive à partir de la Saintonge et de l’Angoumois en s’appuyant sur les fidèles du roi. C’est dans cet entre-deux que vient se situer l’épisode politico-drolatique du passage de Madame de La Guette, « espionne » du roi dans notre secteur.

Madame de La Guette

Alors que son mari est du parti des Princes (de Condé) et se trouve à Bordeaux, elle est du parti du roi et dispose de sa confiance au point qu’elle effectue des missions « diplomatiques » dans son intérêt. Début 1653 elle revient d’une mission en Lorraine et elle est chargée derechef de sonder les intentions des révoltés de Bordeaux et de la Guyenne, en rejoignant son mari et en le ramenant « dans le droit chemin ». C’est une aventurière à la fois sage, elle aime son mari, et intrépide car elle va aller à cheval d’Angoulême à Périgueux, accompagnée d’un ami de son mari et d’un serviteur, en traversant un pays en guerre. Mais c’est aussi comme on disait à cette époque une femme d’esprit. Sa description pleine de drôlerie des personnages et des situations auxquelles elle va être confrontée ont fait, lorsqu’elles paraîtront, le succès de ses mémoires.
Madame de La Guette va donc passer par la Rochebeaucourt se dirigera sur La Tour Blanche où elle va rencontrer le capitaine (frondeur) de la garnison Mr de La Roche-Verney, qui lui fera la cour mais ne lui trouvera qu’un méchant hareng et quelques prunes pour tout repas. Il l’escortera, pendant une lieue, toujours en lui faisant la cour et en caracolant autour d’elle pour lui montrer ses talents de cavalier.
A Bourdeille les frondeurs la prennent pour un grand personnage de la fronde déguisé qui voyage incognito pour rejoindre Condé. Elle ne se démonte pas et discute batailles, stratégie avec eux, elle entre dans le jeu en demandant qu’on lui envoie une servante pour la nuit. Le lendemain elle est réveillée par une parade de cavaliers sous ses fenêtres pour saluer son départ. Porteuse de renseignements précieux pour les troupes royales elle rejoindra Périgueux puis Bordeaux et repassera par Ribérac.

La fin de la Fronde et ses conséquences politiques pour le Chapdeuil et les environs

Quand Mme de La Guette passe à La Tour Blanche, les frondeurs ont perdu la partie mais ne le savent pas encore. L’offensive de Folleville à partir de l’Angoumois est déclenchée alors que les ralliements au roi se font de plus en plus nombreux.
François Grand Du Pouzet seigneur de Tinteillac en est le fer de lance pour le secteur. Le 4 mai 1653, Folleville lui donne l’ordre d’attaquer La Tour Blanche avec l’aide de 120 soldats venus de la ville de Nontron. Le 14 mai l’attaque a lieu, François Grand l’emporte, mais De La Roche-Verney se défendra, la bataille sera rude, et le château de La Tour Blanche en portera les marques. François Grand est nommé immédiatement gouverneur de la place par Folleville. Mais en représailles les frondeurs pilleront son château de Tinteillac sans doute à partir du Chapdeuil, garnison la plus proche.
Le 3 aout la ville de Bordeaux se soumet, c’est la fin de la Fronde.
Cet évènement aura des conséquences politiques importantes pour la vie politique et l’histoire de nos villages car elle marquera la fin de la suprématie des Bourdeille et le début de l’ascension des Labrousse, seigneurs de Verteillac, qui auront choisi le bon camp au bon moment. François Sicaire ne rentrera en grâce auprès du cardinal que deux ans plus tard mais sera complètement discrédité. Louis XIV distribuera honneurs et récompenses à ses soutiens, par exemple la ville de Nontron sera exemptée d’impôts en 1654. Par contre Eymeric Barriasson aura beaucoup d’ennuis et de tracasseries de la part des royalistes et les consuls de Périgueux qui avaient apporté leur soutien à la Fronde verront leurs noms effacés des registres de la ville.
Les évènements de la Fronde à peine effacés des mémoires, deux évènements tragiques auront pour protagonistes des nobles du Chapdeuil.

La mort d’Etienne de la Croix et la fuite de Mathurin Clugniac

Le 30 Janvier 1661, Léonard de Fayolle, seigneur du Chapdeuil demande à ses amis de l’accompagner à Bourdeilles pour rendre visite dans cette ville à la demoiselle Jay du Pressac , fille du lieutenant au siège du présidial de Périgueux. Parmi ses amis il compte Mathurin Clugniac et Etienne de la Croix15 , écuyer, sieur du Chaslard16. Etienne de la Croix voue une haine inexpliquée à Mathurin Clugniac et, au retour de Bourdeilles, alors qu’il chevauche côte à côte avec lui, à un endroit appelé la Croix Saint Marc, il tire un coup de pistolet sur Mathurin et le blesse, il s’apprête à tirer avec son deuxième pistolet, mais Mathurin sort le sien et tue Etienne de Fayolle avant que celui-ci ait eu le temps de faire feu. Bien sur tous les cavaliers sont témoins qu’il a agi en état de légitime défense, mais pour échapper à la justice, Mathurin s’enfuit de la juridiction de Bourdeilles et se réfugie chez M Fargeot, lieutenant de la maréchaussée du Périgord à Saint-Pierre-de-Côle. Il est soigné par la fille de celui-ci, en tombe amoureux et l’épouse en 1663. La demoiselle aura pour dot la terre de Lavit autrefois dans la seigneurie de Bruzac. Epilogue heureux de ce drame : Il adressera une supplique à Louis XIV et sera gracié.

La mort de Jean de Fayolle

On sait peu de choses sur l’assassinat de Jean de Fayolle, seigneur du Chapdeuil, si ce n’est le motif : une querelle de voisinage au sujet d’un droit de colombier. Toujours est-il qu’en 1678, de retour de Paris il est assassiné dans la forêt d’Orléans. Et Jules de Verneilh d’ajouter (1886) « bel exemple des passions des plaideurs d’autrefois et des haines qu’engendraient de futiles motifs ! Mais ces passions ne sont-elles pas de tous les temps et les revolvers modernes ne partent-ils pas pour de moindres raisons que des rivalités seigneuriales ? »

Le Hameau de Lapouze

 C’est dans ce hameau qu’habitera un Montozon, notaire, membre de cette famille qui donnera un maire à Périgueux et qui possèdera un temps le château de Ferraillou.
Un bâtiment tout en longueur garde les traces de fenêtres et de portes probablement du XVIe ou XVIIe siècle et possède un four en très bon état de conservation.

La maison noble de la Jubetie

Passé le hameau de La Pouze nous nous dirigeons sur les coteaux, au sud de la vallée de l’Euche où, en lisière des bois, se trouve le hameau de La Jubetie (parfois écrit Joubetie dans les registres paroissiaux). Ce domaine était un repaire noble, dont il ne reste qu’une partie des bâtiments originels. On remarque dans la cour un très beau puits à la margelle ouvragée, une tour carrée, à la fois habitation dans sa partie inférieure et pigeonnier au dernier étage. A l’intérieur de ce pigeonnier on remarque la potence pivotante permettant, avec une échelle, de nettoyer les casiers dans lesquels se trouvaient les paniers en osier servant de nids aux pigeons. On distingue encore la trace des montants qui devaient supporter ces casiers. Ce système est identique à celui qui est encore visible dans le pigeonnier du château de Tinteillac.






 Dans le logis attenant à la tour, un potager, ancêtre de la cuisinière, est encore visible. Dans une grange du domaine nous pourrons voir, intact, un four et une charrue en bois avec soc en acier en très bon état de conservation. Lors de la construction de ce repaire noble les propriétaires n’eurent pas à aller très loin pour les matériaux, une carrière de pierre est visible à 100 mètres à peine des bâtiments!


 Le Bourg du Chapdeuil
Nous arrivons ensuite dans le bourg qui comprend plusieurs édifices remarquables, en particulier une maison forte17 de plan rectangulaire qui sera modifiée au XVIIe siècle avec l’ajout d’un escalier à vis en pierre dans une tour hors d’œuvre. 18» qui fut jusqu’à la fin du XIXe siècle le passage de la route principale traversant le village d’ouest en est. Derrière le passage vouté, nous avons pu admirer une belle tour comportant une élégante échauguette dont la base est ornée d’un modillon sculpté d’un visage au sourire ironique. Cet ensemble architectural : le passage, la maison située au-dessus de la voute et la maison forte, ont fait de tout temps le bonheur des peintres et des aquarellistes et donne avec le château un cachet particulier à ce village du Périgord.
Cette tour est à 4 pans en façade et carrée à l’arrière. La maison comporte de nombreux linteaux en accolade dont certains pourraient être des réemplois provenant du château. Cette maison forte est située au bord d’un passage vouté en arc outrepassé appelé « passage Napoléon
L’église du Chapdeuil, dédiée à Saint Astier, date de 1877. Elle fut construite sur l’emplacement de l’église dont nous connaissons l’existence par sa donation à l’abbaye de Saint-Cybard en 1142. Au sud de l’église se trouvait une halle qui fut transformée en salle des fêtes à la fin du XXe siècle. En face de cette halle, une maison du XVIIIe siècle fut modifiée en 1899 par l’architecte Meunier pour abriter le presbytère. Enfin, avant d’entrer dans le château par sa belle porte monumentale à portes cochère et piétonne, datant probablement du début du XIXe siècle, on peut observer une nouvelle maison à balet, dotée de deux colonnes supportant l’avancée du toit.

Le Château du Chapdeuil

Clou de la promenade historique, le Château a suscité de nombreuses études d’historiens et l’enthousiasme des amateurs de vieilles demeures historiques. Dernière étape de notre parcours, avec un retard d’une demi-heure sur l’horaire prévu, notre arrivée tardive a surpris la propriétaire qui ne put nous accueillir comme elle le souhaitait. Je la prie de m’en excuser, mais le déplacement de plus de cent personnes ne se maîtrise pas facilement !
C’est un château de plaine bâtit sur un ilot créé artificiellement à partir méandre de l’Euche, comme indiqué plus haut.
La chronologie de son édification jusqu’à son visage actuel a donné lieu, de la part des historiens à des versions différentes.
Pour Jules de Verneilh19, le premier à analyser son architecture, « Malgré ses petites dimensions, il n’est pas en Périgord de château du XIIe siècle plus incontestable que celui-là, comme il n’en est pas d’aussi peu important.
Dans notre pays où les vrais donjons sont assez rares, celui du Chapdeuil, sauf les mâchicoulis du XVe siècle dont on l’a couronné et quelques fenêtres du même temps percées après coup, est parfaitement intact. »
Ce ne sera pas l’avis de Pierre Moreau-Desthouars qui un peu plus de cent ans plus tard proposera une autre chronologie. Après avoir passé en revue les différentes parties du donjon voici ce qu’il en dit : « La plus grande originalité du donjon du Chapdeuil réside dans la disposition exceptionnelle de ses contreforts, notamment ceux de la façade sud tournée vers le village. Ils présentent en effet deux arcatures dont la raison d’être semble plus décorative que fonctionnelle. Le contrefort central partant de fond comme les deux autres, s’élargit soudain par l’artifice d’un encorbellement maçonné au niveau du premier étage, il ne s’agit nullement d’un caprice décoratif ; cet élargissement est, en effet, nécessité par la présence de deux cheminées intérieures dont ce large contrefort constitue le contrecœur. Ces arcatures aveugles font ranger le donjon du Chapdeuil dans une famille restreinte de donjons utilisant un type de décor apparenté qu’on ne retrouve qu’au sud de la Charente et de la Vienne, tels le donjon de La Tour-Blanche tout proche ou celui de la Rochefoucault en Charente ou bien encore ceux de Montbrun et Château-Chervix en Haute-Vienne.
La conclusion de Moreau-Desthouars infirme la datation du XIIe siècle faite par Jules de Verneilh :
« Etabli dans un ensemble à l’origine conçu pour l’attaque et la défense, derrière des lignes successives de murailles et du large fossé d’antique création il peut à première vue faire illusion. Mais, à l’exception des mâchicoulis, il ne comporte aucun aménagement véritablement militaire. Au contraire, la faible épaisseur des murs qui ne résisteraient pas même à une petite artillerie… font soupçonner que ce donjon a été construit pour tout autre raison. »
Puis il passe en revue les éléments contredisant la datation au XIIe siècle : « les mâchicoulis, pas antérieurs au début du XIVe siècle bien sûr, mais aussi la modénature20 des chambranles des cheminées et des fenêtres qui ne sauraient remonter également au-delà du XIVe. » Il propose donc de rajeunir la tour à la fin du XVe ou même au début du XVIe siècle, arguant du fait qu’en Périgord cet archaïsme architectural est fréquent (tour de Narbonne, tour de Richemont).
Dernier venu dans cette controverse, Vincent Marabout, chargé de mission à la conservation du patrimoine départemental nous propose une chronologie argumentée très convaincante. Dans son article « l’Euche, l’îlot et l’aula » voici ce que nous propose V Marabout :
« Jusqu’alors, les observateurs se sont mépris sur la nature et la chronologie du château du Chapdeuil. Les plus précoces y voyaient un donjon roman. Difficile alors d’expliquer ses dimensions réduites et la faiblesse des murs, à peine trois pieds d’épaisseur alors que les tors maitresses de la même époque en affichent le double. Plus récemment, d’autres y ont vu un donjon de la fin du XVe siècle aux traits archaïques, tels ceux de Narbonne (Saint-Just) ou de Saint-Crépin-de-Richemont situés à proximité. L’implantation des contreforts et la présence au rez-de-chaussée de trois baies à ébrasement, typiquement romanes, rendent peu crédible cet argumentaire.


Expliquer Chapdeuil par la transformation d’une aula primitive, c’est-à-dire d’une grande salle seigneuriale romane permet de répondre aux interrogations. Au XIIe siècle, le logis du seigneur, souvent composé d’une salle et d’une chambre (aula et camera) est encore rarement associé à une tour maîtresse, symbole du pouvoir et de la puissance militaire comme à Bourdeilles. Les grandes salles romanes possèdent des caractéristiques communes. Le rez-de-chaussée, faiblement éclairé, tient lieu de cuisine et de réserve. Le deuxième niveau, ou étage noble, est destiné à la réception des hôtes du seigneur et à son propre couchage. On y accède par un escalier extérieur souvent en bois. Les aulae les plus importantes possédaient plusieurs étages. Toutes étaient dépourvues de fortifications. Chapdeuil n’échappe pas à la règle.
Au début de la guerre de Cent Ans, sur la base romane dont il ne reste qu’une partie du rez-de-chaussée et quelques vestiges de l’étage, on a édifié une tour dominée par une ceinture de mâchicoulis. Elle fut équipée de baies à coussièges et de cheminées conformes aux canons de l’époque. A l’ouest, une cage d’escalier est venue remplacer l’ancien degré, condamnant l’accès primitif encore visible »
Par contre pas de controverse en ce qui concerne la partie nord du château :
« Au XVIIe siècle, la construction du logis nord et du pigeonnier flanquant la façade orientale donnent au château sa physionomie actuelle »
J’ajoute pour être complet que pendant la Révolution, le château reçut la visite des envoyés de Lakanal le 21 nivôse 1793. Leur rapport porte les injonctions suivantes : « Avons remarqué à côté une maison en forme de château, situé dans le bourg du Chadeuil, appartenant à la citoyenne Christine Fayolle, et à côté du corps de logis un gros et haut pavillon bordé de créneaux et canonnières ; lequel pavillon avons ordonné la démolition, comme aussi nous avons trouvé que ladite maison, jardin et bassecour, sont entourés d’un fossé de 10 à 12 pieds de profondeur sur 25 à 30 pieds de largeur garni d’eau net traversé d’un pont en pierre faisant l’entrée du dit château qui par sa construction imposante doit être comblé depuis la porte gauche de l’entrée du sud jusqu’à la partie droite où l’eau prend son entrée, exceptant expressément la partie nécessaire au moulin dépendant de la même maison. La Démolition devrait commencer le 30 du courant »
Signé : Delaître, Cruveiller officier municipal, Lacour et Labonne
La différence d’appareil montre que, seules les façades nord et ouest du logis du XVIIe siècle, ont été démolies en application du décret. Mais leur reconstruction fut entreprise quinze ans plus tard comme le montre la date de 1811 gravée sur une poutre maîtresse de la charpente de couverture.
On notera dans ce rapport l’existence d’un moulin à eau, certainement banal, disparu depuis.
Le petit châtelet d’entrée, donnant accès au pont dormant, portait sur le linteau de sa porte des armoiries qui furent martelées.
Enfin, dernier élément de cette propriété noble, un colombier monumental de 11 mètres de diamètre coiffé d’un toit en poivrière recouvert de tuiles plates, ce pigeonnier pourrait être daté de la fin du XVIIe début du XVIIIe siècle car il ne figure pas dans l’état des biens de Jean de Fayolle en 1678.

Les seigneurs du Chapdeuil21

Les « La Tour »
Les premiers seigneurs du Chapdeuil appartiennent à la famille La Tour et sont vassaux du seigneur de La Tour Blanche.
Guillaume de La Tour, archidiacre de Périgueux, reçoit en partage la seigneurie du Chapdeuil et son frère Itier conserve celle de La Tour-Blanche. L’un des trois enfants d’Itier, Guy devient après Guillaume seigneur du Chapdeuil. Lorsque sa sœur, Marquèse, se marie en 1308, avec Hélie de Saint-Astier, Guillaume lui constitue une rente de 25 Livres sur le Chapdeuil, Leguillac, Monsec et Vieux Mareuil.
En 1311, dans son testament, Itier de La Tour désigne son frère Guillaume l’archidiacre comme son exécuteur testamentaire. De son mariage avec Raimonde il laisse trois enfants, Marquèse Dame de Montréal, Guy seigneur du Chapdeuil, Guillaume et Pierre coseigneurs de La Tour-Blanche.
Au début de la guerre de Cent ans, en 1358, un jugement oblige le comte du Périgord de restituer à Guy de la Tour, seigneur du Chapdeuil, le bourg et la paroisse de Verteillac, qu’il s’était indument approprié. Notons au passage que bien que vassal du seigneur de La Tour Blanche, Chapdeuil est érigé très tôt en châtellenie comprenant Chapdeuil, Bourg des Maisons, Verteillac. Puis à une date inconnue Verteillac est de nouveau détaché de la châtellenie du Chapdeuil. L’almanach de Guyenne de 1760, ne qualifie plus le Chapdeuil que de repaire noble ayant droit de justice sur le Chapdeuil et Bourg des Maisons
Les « Saint-Astier »
Faute d’héritier mâle, au décès de Guy de La Tour, la seigneurie tombe par succession dans la maison des Saint-Astier.
Les « Peronnec et Salagnac »
Vers 1400, Catherine de Saint-Astier épouse Géraud de Peronnec, seigneur de Loupiac. Leur fils Michel se marie vers 1461 avec Agnes de Lastours. Leur fille unique, Anne, se marie avec Pierre de Pombriand, chambellan du roi Charles VII et lui apporte le Château de Montréal et celui du Chapdeuil.
Puis vers la fin du XVe siècle, en 1495 nous voyons apparaitre une famille, les Salagnac, qui deviennent coseigneurs du Chapdeuil avec les Peronnec.
Les « Pombriand »
François de Pombriand, sénéchal et gouverneur du Limousin, seigneur de Montréal et du Chapdeuil, se marie trois fois. Il meurt en 1569 et laisse pour héritier universel son fils Hector âgé de quatre ans et demi, issu de son second mariage. Hector épouse Catherine de Montardit en 1584, il sera chevalier de l’ordre du roi, gentilhomme ordinaire de sa chambre.
Les « Foucauld »
Françoise de Pombriand, fille d’Hector de Pombriand et de Catherine de Montardit s’unit en 1611 à Gaston de Foucauld et lui apporte en dot le Chapdeuil. C’est à partir de ce moment que les Foucauld ont joint à leur nom celui de Pombriand.
Les « Fayolle »
En juillet 1633, on célèbre le mariage de Catherine, leur fille avec Jean de Fayolle. Dans la dot de l’épousée il y a le Chapdeuil qui restera dans la famille de Fayolle jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Comme nous l’avons vu plus haut Jean de Fayolle sera assassiné en Juin 1678.
Son fils ainé, Gaston Isaac, assiste à l’inventaire du château au requis de sa mère Catherine de Foucauld. Il est marié à Dauphine de Labrousse de Verteillac et, dans un acte daté de 1681, son fils Nicolas est qualifié de chevalier, seigneur du Chapdeuil.
Toutefois Gaston-Isaac ne vivait plus lorsque sa mère fit son testament en 1680 par lequel elle donne la seigneurie du Chapdeuil à Léonard son troisième fils qui y fonde une branche, Léonard de Fayolle, son fils, lui succèdera.
Léonard de Fayolle, écuyer, seigneur de la Sipière, teste le 1er juin 1686. Il s’est marié le 11 janvier 1680 à Marie Salleton de Jamaux dont il a deux enfants : Françoise et Pierre. Pierre s’unit le 31 décembre à Marie du Lau qui lui donne deux enfants, l’un, Nicolas, devient prêtre, l’autre, Jean, épouse Marguerite Gauthier « très avancée en âge » dont il n’aura pas d’enfant. La généalogie de cette branche s’arrête donc là.
Demoiselle Marie-Dauphine de Fayolle devient en 1739 la deuxième épouse de Claude Grand, seigneur du Reclaud et de Massac. Leur fils Claude Grand né en 1755, se qualifie encore seigneur du Chapdeuil mais il n’en possède plus que le château et la pré-clôture, le reste « avec toute la justice, les droits seigneuriaux de halle, foires, péages, litres en dedans et au dehors, sonneries, banc et tombereaux » ayant été acquis par Henri Bertin22.
Claude Grand épouse en 1774 Claire Varaillon. Ils habitent le Château. Ils ont plusieurs enfants, Christine en 1775, Charlotte en 1784, et Jean Grand de Luxolières, en 1787 dont la marraine est Christine Gauthier de Fayolle, sa grand-tante. En 1789, cette dernière, en qualité d’usufruitière du fief et habitante du château, se fait représenter à l’assemblée de la noblesse par André-Alain de Fayolle auquel elle donne pouvoir ; c’est elle qui est désignée comme la propriétaire du château dans le décret de démolition en 1793.
Comme il le fait lui-même remarquer dans son texte P Moreau-Dethouars, la chronologie des propriétaires du Château au XIXe siècle est moins fouillée, il s’est basé sur les renseignements fournis par Emmanuel Duchazaud sur la famille Gros du Beler, propriétaire du château en 1851 et 1886.
Les Gros de Beler
«Cette famille bien connue de la haute bourgeoisie de Périgueux, descendante des Bertin, avait plusieurs attaches anciennes dans le Ribéracois. Elle en était d’abord originaire (Auriac de Bourzac), ensuite Antoine Gros de Beler, consul de Périgueux et Avocat au Parlement vient se marier à Saint Just, dons tout près du Chapdeuil en 1721 avec Jeanne de Goumondie. Enfin Joseph Gros de Beler vient se marier en 1841 au château du Reclaud à Bourg des Maisons avec Christine Grand de Luxolière de Tinteillac, fille de Claude et Marguerite du Souchet de Narbonne. Ainsi s’explique la présence des Gros de Beler au XIXe siècle au château du Chapdeuil »
Au XXe siècle le château sera acheté par la famille Mazieres-Augereau puis en 1978 par les actuels propriétaires Mme et M. Daleyrac.
Souhaitons, comme en a exprimé le souhait Mme Daleyrac dans son allocution de bienvenue, que les archéologues s’intéressent un jour à ce château qui peut nous livrer de précieux renseignements sur la genèse d’un château fort de plaine.
Le 21 septembre 2013
Gabriel Duverneuil

Bibliographie

« Une liste des fiefs de la famille de la Tour » Louis Grillon, revue Mémoire de la Dordogne N°16
« La compagnie vassalique du seigneur de LA TOUR-BLANCHE en 1249 », B. Fournioux, Documents d’Archéologie Périgourdine (ADRAP) 1991
« Les Mémoires de Mme de la Guette », SHAP 1915
« Livre journal de Pierre Bessot 1609-1652 », SHAP 1893
« Le repaire de Ramefort : un document inédit sur la Fronde en Périgord », SHAP 1898
« Le château du Chapdeuil », Jules de Verneilh, SHAP 1887
« Le château du Chapdeuil », P. Moreau-Desthouars, dans « vieilles demeures du Périgord, n°2, PLB éditions, 1989
« Le signe des puissants » Line Beker, SHAP 2012
« L’Euche, l’ilot et l’aula », V. Marabout, article à paraitre
«Les chevaliers périgourdins et leur assise territoriale au XIIIe   XIVe siècle», Bernard Fournioux, Archéologie médiévale, t. XVIII, 1988,
« Le Chapdeuil en 1793 », « Le recensement de 1846 », « Le Chapdeuil au XIXe siècle chronologie de la fusion/séparation entre Saint-Just et le Chapdeuil », Mr Durand, documents en mairie du Chapdeuil.
« Notes sur le Chapdeuil », A. Giraud, manuscrits 1913
« Croquis de monuments et de sites du Périgord par Lucien De Malville » Association Lucien De Malville, éditions de l’entre-deux-mers.

Remerciements

Remerciement aux propriétaires pour nous avoir permis d’accéder aux monuments visités : Mme&M. Vriezen à Fougères, Mme&M. De Tessières et Mme&M. Marcus aux Granges, Mme&M. Daleyrac pour le château et le colombier, Mme Guichard et M. Dubois à la Jubetie, Mme Burnez pour sa maison dans le Bourg.
Remerciements à Mme Marcheville, M. Bonnefon, M. Raynaud, M. Desvergnes, M. Mazeau, Mme la Maire du Chapdeuil et à Mme&M. Daleyrac pour les renseignements et documents qu’ils m’ont transmis.
Merci à tous les bénévoles qui ont aidé à nettoyer les chemins, participé à l’encadrement de la promenade historique, cuisiné et servi, avec le sourire, l’excellent repas que nous avons partagé dans la salle des fêtes du Chapdeuil.

1 N’ayant aucun renseignement sur cette croix, je serai reconnaissant à toute personne en possédant de m’en faire part.

2 Archives Départementales : 2 E 1094-3

3 Comme pour la note 1, les informations sont les bienvenues.

4 Médecin sans le grade de docteur

5 Personne experte en procédure et instruction de procès

6 Personne chargée d’administrer les biens propres de la paroisse au sein d’un conseil dénommé « fabrique ».

7 Fabriquant de galoches : autre nom des sabots en bois

8 Tisserands dédiés à la confection de la serge (mode de tissage)

9 Alain de Solminihac (1593-1659) prélat réformateur de l’abbaye de Chancelade, puis nommé « malgré lui » évêque de Cahors. Il sera un fer de lance de la contre-réforme catholique en Périgord et Quercy

10 Nom des levées d’impôts destinés à la guerre.

11 Condé : Louis de Bourbon, prince de Condé, duc d’Enghien, auréolé du prestige du vainqueur des Espagnols à la bataille de Rocroy (1643) sera surnommé « Le Grand Condé »

12 Avec laquelle la France est en guerre !

13 C’est-à-dire de représentant du roi en Périgord !

14 Château situé entre Bourdeilles et Brantôme

15 Les De la Croix sont seigneurs de Jovelle à La Tour Blanche

16 Hôtel noble dans La Tour Blanche

17 Maison forte : C’est à partir du XIIe siècle que les manuscrits signalent les « Domus fortis », distinctes des « castrum ». Les historiens actuels font donc la différence entre le château lieu de résidence d’un détenteur de droit de ban à l’origine d’une circonscription territoriale comme une châtellenie et la maison forte résidence des chevaliers (miles) qui accèdent à la noblesse dans la deuxième moitié du XIIe siècle, ce phénomène durera jusqu’au XVIe siècle

18 On connait l’engouement des Français pour qualifier nombre de routes « routes Napoléon », Le Chapdeuil n’a sans doute pas voulu être en reste. Mais … Napoléon n’est jamais passé en Dordogne, il y fut attendu, mais ne vint jamais. Par contre il est possible que le Chapdeuil ait vu passer des troupes napoléoniennes se rendant en Espagne !

19 Jules de Verneilh : (1823-1899) historien, archéologue, poète, dessinateur, un des fondateurs de la Société Historique et Archéologique du Périgord

20 Modénature : proportions et disposition des éléments d’ornement des façades, constituant le style architectural.

21 La chronologie des seigneurs du Chapdeuil est extraite du travail de Pierre Moreau-Dethouars, ouvrage cité dans la bibliographie. C’est celle qui me paraît la plus complète. Plus complète que celle établie par les historiens du XIXe siècle, ayant étudié la chronologie des seigneurs du Chapdeuil, Jules de Verneilh, Dujarric-Descombes. Toutes les références figurent dans le texte de P Moreau-Dethouars, je ne les reproduis pas pour ne pas surcharger ce compte rendu. Ma seule réserve concerne l’assimilation du troubadour Guillaume de la Tour à la lignée des seigneurs de La Tour. Aucun texte ne le prouve et tout ce que l’on sait de sa vie (en partie légendaire) se passe en Italie du Nord. Qu’il soit originaire de la Tour Blanche est possible mais il semble plus vraisemblable que Guillaume de la Tour soit un « nom d’artiste ».

22 Henri Léonard Jean-Baptiste Bertin (1720-1792) : né à Périgueux, avocat à Bordeaux. Il fut successivement président du Grand Conseil, intendant du Roussillon, intendant de Lyon, Lieutenant Général de police à Paris puis contrôleur général des finances de Louis XIV.