Rencontres
historiques de la Tour Blanche
Samedi
21 Novembre 2015
Ces
rencontres étaient placées sous le signe de l’histoire et de
l’archéologie du fer, de la pierre et de la céramique en Périgord
et rassemblaient près d’une cen- taine d’auditeurs.
Yvon
Duteil
décrit, à l’aide d’une projection de diapositives les étapes
de la construction d’un bas-fourneau : sur un socle de pierre,
on érigeait un four cylindrique fait d’un mélange de terre et de
paille d’un diamètre de 30 cm. et d’une hauteur d’environ 1,20
m. le minerai de fer broyé était introduit avec du charbon de bois.
Le feu devait porter le minerai à 1350° et laisser dans le bas du
four une « loupe » qu’on transformait en lingot et des
scories. A l’évidence, le four devait être détruit pour obtenir
le métal. Ces fourneaux étaient souvent situés en bordure de
vallon. Le conférencier a trouvé l’un de ces bas-fourneaux
celtes daté de quatre siècles avant J.C.
Après avoir répondu à
quelques questions, Yvon Duteil cède la parole à Jérémy
Bonnenfant.
L’archéologue,
qui a fouillé le site de Grand Bois, près du château d’Auberoche
explique les trois technologies de la réduction du fer en
bas-fourneau : la première à scorie piégée qu’on trouve au
8ème
siècle avant J.C., la seconde qui rend le fourneau réutilisable,
qu’on trouve vers le 1er
siècle avant J.C., enfin la troisième à scorie écoulée jusqu’à
l’Antiquité tardive. Au Moyen-Âge, le marteau-pilon hydraulique
représente un progrès considérable dans le travail du fer, enfin,
au 16èmesiècle,
les souffleries deviennent plus puissantes. Le procédé devient
indirect dans les hauts-fourneaux où les scories prennent le nom de
laitier. Dans son travail d’archéologue, le conférencier cherche
à tracer l’évolution du site qui représente 350 minières
d’extraction jusqu’au 17ème
siècle, des zones de charbonnage mais l’absence de forge. Les
dimensions des bas-fourneaux sont données par le volume des scories,
cependant, les rendements sont faibles. Notre conférencier répond à
de nombreuses questions.
Puis,
une pause permet aux auditeurs de se détendre, de se désaltérer en
dégustant des pâtisseries, d’observerAlessiaRénier
façonner la terre « à l’ancienne » en discutant
poterie et à déambuler devant les expositions : vitrines de
Christian
Chevillotprésentant
une belle collection de répliques de céramiques anciennes, Yvon
Duteil
ayant apporté du minerai de fer brut, du minerai broyé et une
loupe. Une exposition très fournie permet de voir de nombreux outils
de carrier, enfin, les ouvrages des intervenants sont offerts à la
dédicace, d’autres livres peuvent être empruntés.
C’est
Christian
Chevillot,
avec sa verve, sa passion et sa bonne humeur habi- tuelles qui
reprend le micro pour présenter un vaste et détaillé panorama de
la céramique sur 5000 ans. Née en Mésopotamie, son origine
correspond à peu près à la sédentarisation des populations, elle
nous parvient par deux parcours : la vallée Danube au nord et
la Méditerranée au sud et se différenties par des décors bien
précis. Elle sert à la conservation de la nourriture et à son
élabo- ration. Les fonds sont hémisphériques, prouvant l’absence
de surfaces de pose planes. Elle est obtenue grâce à un mélange
d’argile et de sable ou de calcite, puis cuite par des procédés
de plus en plus perfectionnés au fil du temps. L’intervenant
projette de belles diapositives de copies de poteries anciennes, les
originales étant reconstituées et très souvent incomplètes, les
décors permettent de les dater et de les situer de même que les
anses. Tous les décors sont géométriques et il faut attendre la
fin de l’âge du bronze pour voir apparaître des décors animaux
ou humains. On trouve des fonds plats à partir d’environ 3200
avant J.C. Christian Chevillot termine son exposé en passant en
revue les divers types de vaisselles et en invitant, à l’occasion
du salon du goût de Périgueux à un repas celte (il n’aime pas
« gaulois », terme inventé par Jules César) au débutet
romain en clôture.
Notre intervenant répond à quelques questions
et cède la parole à
André
Guillin
qui retrace l’évolution des meules, instrument indispen- sable à
l’écrasement des céréales et à la réalisation de farines. On
en trouve plusieurs types : avant 300 avant J.C., la meule dite
va et vient, qui broie simplement entre deux pierres manuellement,
puis la meule rotative manuelle, au Moyen Âge la meule monolithique.
Au 17/18ème
siècle apparait la meule rayonnée et en quartiers, cerclée de fer.
Dans l’inventaire effectué en 1809, la Dordogne est le deuxième
département français en matière d’extraction de meules
fournissant les moulins à vent, à eau du grand sud-ouest. Notre
intervenant a étudié particulièrement les meulières de Domme dont
la production s’étend sur plusieurs siècles. Celui-ci a retrouvé
une commande de 4 meules date de 1778. Les utilisations sont
multiples : blé, noix, olives, porcelaine, etc…et la qualité
de la pierre est essentielle car l’usure de la pierre produit des
parcelles abrasives mélangées à la farine par exemple et durant la
période médiévale alors que le pain était fondamental, il usait
les dents de la population. Une projection des documents collectés
vient illustrer la conférence, dont la deuxième partie est
consacrée à la polémique sur la qualité de la pierre, entre les
meuliers de la Ferté-sous-Jouarre en Seine et Marne et les
fabricants périgordins de meules. En 1881 une société la Société
Générale Meulière de la Ferté installera une agence à Cénac.
Notre conférencier termine sur une anecdote concernant le poids
délirant d’un marteau de carrier de 37 kg,apparaissant dans
plusieurs ouvrages savants, alors que s’il en pèse 5, c’est déjà
pas mal !
Pour
clore ces rencontres de la Tour Blanche, Gabriel
Duverneuil
rend compte du travail du Club Histoire à Jovelle en soulignant en
premier lieu que l’on extrait de la pierre à la Tour Blanche
depuis 800 ans parce qu’elle est tendre, donc se travaille
aisément, non gélive et pouvant être immergée. A l’aide de
diapositives, il donne un aperçu géologique de sa formation et de
ses affleure- ments. De l’époque médiévale à nos jours,
l’extraction s’est faite par des car- rières à ciel ouvert, il
en reste deux encore en exploitation à Paussac. En 1836, la pierre
de Jovelle est considérée comme excellente et des carrières
souterraines sont creusées, en 1841 on ouvre la voie de la D14, en
1860, un effondrement se produit obligeant les exploitants à se
plier à une nouvelle réglementation sur les dimensions des piliers
de soutènement. En 1894, l’arrivée du chemin de fer, avec son
pont de transbordement à la gare, permet d’augmenter le rayon
d’acheminement des blocs. Gabriel Duverneuil décrit ensuite dans
le détail le travail et les outils des carriers, leur éclairage :
d’abord au pétrole puis à l’acétylène. L’exploitation des
carrières souterraines de Jovelle nord s’arrête en 1894,et ces
carrières connaissent alors une seconde vie grâce aux champignons
de souche dont l’exploitation débute en 1904. Notre conférencier
explique le processus de production des champignons et sa
terminologie, qui sera utile dans le relevé des graffitis. Le Club,
sous la houlette de Jean-Pierre Chadelle, archéologue départemental,
a fouillé une carrière de meules au-dessus de l’abri orné.
Depuis 2008, le Club Histoire se consacre au relevé systématique
des graffitis des carrières. Plus de 1000 photos concernant la
carrière de Jovelle Nord, ont été prises et classées. Elles nous
renseignent sur les noms des carriers, dont certaines familles
demeurent, leur production, le vocabulaire, la chronologie, les
événements politiques comme Napoléon III, l’avènement de la
République, Gambetta, le général Boulanger en 1886. Les graffiti
des champignonnistes prennent le relais avec la guerre de 14 et la
venue du Négus en 1935. Pour terminer, notre Président annonce un
« scoop » en montrant une image superbe en couleur d’un
rhinocéros préhistorique prise dans une carrière et avoue, après
la surprise générale, qu’il s’agit d’un essai de reproduction
de l’artiste GillesTosello, qui s’est entraîné pour son travail
dans le fac-similé de la grotte Chauvet, un deuxième scoop est un
portrait de Trotsky dessiné par un champignonniste.
Enfin,
Gabriel Duverneuil émet le souhait que les carrières aient une
troisième vie dans ce lieu de Jovelle qui montre une présence
humaine de 25000 ans avec son abri orné, son château, ses carrières
de pierre et de meules et enfin, ses champignonnières. Les
rencontres se sont terminées dans la détente et la bonne humeur par
un apéritif.
André
Vigne
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